Sérénade

Les crapaudes géantes coassent à la lune, cachée sous la couette de nuages. Croissant imperceptible, mais que l’on sent grossir, chaque soir, au rythme de leur chant. Elles coassent à la lune de la Grande Marée, qui vient, gorgée d’eau pure, abreuver la planète. L’orchestre retentit maintenant tous les soirs. Les voix des lointaines Flaques se retrouvent, se métissent, s’alourdissent, et se fondent. La chanson prend forme, s’étoffe de notes, et couvre peu à peu tous les registres. En choeur ou en solo, les gardiennes de l’équilibre de l’eau, se préparent à dégorger la lune. Maintenant, la nuit noire, truffée de nuages noirs, vibre et vrombit comme un danseur en transe. Les hommes de la planète tremblent d’impatience.

Les hommes venus d’ailleurs tremblent de peur. Des voix effrayées fusent de partout.

— C’est affreux ! Qu’est-ce que c’est ?

— C’est un bruit de tonnerre ?

— Un moteur ?

— C’est peut-être un tremblement de terre !

Un petit vent de panique souffle, ce soir, à l’intérieur du Vaisseau. La nuit d’Ixe, qui vient de tomber, n’en est pas responsable. Les journées se font opaques, le brouillard de plus en plus dense. Les nuages les emmurent dans leur quarantaine. Dans cette nouvelle prison, ils entendent un grondement menaçant qui déchire la nuit.